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Une stratégie du soin ouvertement colonialiste et impérialiste accompagne la lutte contre Ebola. L'Union africaine ne compte pour rien dans les stratégies de l'Ue, de l'Otan, de l'Oms et des Usa en Afrique, qu'il s'agisse du terrorisme en Afrique ou des problèmes sanitaires. C'est le Nord qui décide pour le Sud dans ses anciennes colonies de ce qu'il y a de mieux pour ces populations en s'appuyant sur des kleptocrates mis au pouvoir par les pays occidentaux.

Au moment où près de 10 000 soldats des forces de l'Otan (Etats Unis, Allemagne, France, Grande-Bretagne) vont s'abattre sur l'Afrique de l'Ouest pour lutter contre l'Ebola, dans le plus grand silence de leurs médias complices, on ne peut que s'étonner de cette conception du soin si spécifique aux pays occidentaux, tandis que les Russes, les Cubains déploient laboratoires et centaines de médecins sans déployer aucun militaire. C'est à un tel point que les autorités étatsuniennes étaient incapables de justifier devant le Congrès les subtilités et les détails de cette opération militaire si ce n'est de créer un centre de commandement Africom à Monrovia.

Ce déploiement intervient au moment où Foreign Policy (The Ultimate Ebola Fighting Force) évoque la possibilité de créer un Otan médical voulu par l'Oms et les pays occidentaux. Une force militaro-humanitaire capable d'intervenir sans l'aval des pays hôtes pour lutter contre une épidémie ravageant ce pays : soit une reconquête militaire de ces pays au nom du prétexte médical.

« Cet «Otan médical», pour ainsi dire, consisterait en une coalition de pays qui recruterait des équipes spécialisées - composées de médecins, d'infirmières et d'autres - des organismes et des systèmes de santé nationaux. L'alliance pourrait nommer un médecin en chef, et tous les pays participants développeraient conjointement des plans opérationnels pour mener des exercices de répétition.

Les équipes seront déployées à la demande de l'Oms suite à la déclaration d'une urgence sanitaire mondiale. Elles pourraient être mobilisées pour supprimer une maladie soit complètement, ou à un niveau tel que le pays pourrait alors gérer la crise lui-même. Elles auraient le pouvoir de fournir directement les traitements médicamenteux et mettre en œuvre des mesures de prévention, sans ingérence politique de la part d'un pays dans lequel une épidémie est en train de se produire. » (Ebola et impérialisme militaro-médical au Liberia : vers un "Otan médical" ?).

On comprend alors mieux le pourquoi du déploiement de ces milliers de militaires, s’il faut effectivement administrer aux populations locales des traitements sans l'aval de leur population ou de leur gouvernement.

Rappelons seulement qu'en Haïti les Etats Unis avaient déployé 10 000 Marines, le lendemain du tremblement de terre en janvier 2010, pour envoyer dans un second temps des équipes de médecins et de chirurgiens sur le terrain, auxquels Msf a reproché un usage abusif de l'amputation. Fin 2010, une épidémie de cholera a éclaté faisant 3000 morts en Haïti.

"Un groupe d'experts nommés par l'Onu a conclu que l'épidémie de choléra en Haiti était due à la contamination de la rivière Meye, affluent du fleuve Artibonite, par une souche pathogène de Vibrio choléra d'origine sud-asiatique, à la suite d'activités humaines. Selon le ministre de la Santé haïtien, Alex Larsen, il s'agit d'une souche de type O1, la plus dangereuse. Une étude publiée peu après a démontré l'identité parfaite des souches isolées au Népal et en Haiti au début de l'automne 2010. Selon une synthèse publiée début 2012, les données épidémiologiques et génétiques montrent que la source du choléra en Haiti provient de la relève d'un bataillon de casques bleus népalais au début du mois d'octobre 2010." (Wikipedia). Suite aux plaintes portées par la société civile haïtienne contre ce contingent de casques bleus, les Etats-Unis ont pourtant soutenu l'impunité de l'Onu.

Assiste-t-on à un procédé similaire avec l'Ebola ? Nul ne peut le dire pour le moment. Mais la communication de l'Oms apparaît de plus en plus alarmiste alors que nombre de ses derniers rapports ne vont pas dans le même sens. Si l'on ne peut nier la gravité de l'épidémie actuelle, l'Oms semble reporter une augmentation du nombre de cas relayés par les médias de masse occidentaux alors que les derniers rapports de l'OMS montrent un net infléchissement de l'épidémie dans certaines régions sans qu'il faille crier victoires pour autant.

Dans son rapport du 1er octobre (Ebola Response Roadmap Situation Report), l'Oms notait une baisse du nombre de nouveaux cas depuis deux semaines en Afrique de l'Ouest. Dans son rapport du 3 octobre (WHO: Ebola response roadmap update, October 3, 2014) elle reconnaissait également avoir surévalué le nombre de cas alors que la prévalence des cas d'EBola diminue. Ainsi, au Libéria, il y a environ 931 cas avéré tandis que l'Oms en rapporte plus de 3834.

Le Libéria étant précisément l'endroit où les 4000 militaires Us sont en train d'être déployés (les Etats Unis ayant récemment révisé leur nombre à la hausse de 3000 le gouvernement Obama est passé à 4000 soldats ) sans que les éléments sur le terrain puissent justifier un tel déploiement d'après les chiffres non diffusés de l'Oms dans les médias.

Lorsque l'Oms communique sur un nombre de cas de plus de 4000 morts liés à l'Ebola en Afrique de l'Ouest, elle communique un chiffre qui n'a pas été confirmé, mais qui comprend les cas confirmés avec les cas probables et les cas suspectés. Ainsi si l'on consulte leur rapport du 3 octobre (avant que l'Oms annonce le chiffre de plus de 4000 décès) : il y aurait 3431 décès liés à l'Ebola mais sur ces 3431 seulement 2071 ont été confirmés.

Dans son dernier rapport du 10 octobre, l'Oms estime le nombre de décès à 4024 selon les mêmes calculs alors que le nombre de décès confirmé lié à l'Ebola est de 2423.

Vous aurez constaté que le nombre de décès entre le rapport du 8 octobre et du 10 octobre bondit de 3431 à 4024 soit 593 de plus imputables à l'Ebola alors que le nombre de décès confirmés liés à l'Ebola sur la même période bondit de seulement de 352 (on passe de 2071 décès confirmés à 2423). Cela veut dire que l'Oms rapporte 243 décès supplémentaires imputables à l'Ebola sans aucune preuve biologique. D'autre part l'Oms décrit un nombre de décès supplémentaire au nombre de cas car ceux-ci auraient été rapportés récemment et attribués à l'EBola notamment en Sierra Leone. Une comptabilité pour le moins erratique qui tend à surévaluer la crise sanitaire dans ces pays même si on ne peut méconnaître l'augmentation de l'incidence de la maladie, selon l'Oms.
Dans son rapport du 8 octobre, l'Oms, tout en tenant un ton particulièrement alarmiste, annonce que le nombre de cas a diminué au Libéria dans la région de Lofa, et en Sierra Leone dans les régions de Kailahun et de Kenema (l'un des épicentres où se situait un laboratoire biologique Us luttant contre le bioterrorisme qui a dû fermer en aout devant les protestations des populations et du gouvernement de Sierra Leone). Ces deux pays sont les endroits pourtant où les forces militaires Us et britanniques vont débarquer en force. Tandis que des forces militaro-humanitaires franco-allemande vont débarquer en Guinée. A chacun sa sphère d'influence. Quelque 4500 militaires et civils allemands issus de l'armée allemande sont prêts à intervenir.

Inutile de dire que dans ce contexte les rumeurs les plus folles circulent dans ces pays. Ainsi un article du Liberian Observer met en cause des faux diagnostics d'Ebola par les hôpitaux locaux dû à un leurre utilisé par des manipulateurs. Selon ce journal qui n'en est pas à des approximations près, des personnes mal intentionnées infesteraient les puits d'eau ou les bouteilles d'eau à base de formaldéhyde qui à haute dose dans l'eau pourrait provoquer des symptômes similaires à l'Ebola. La méfiance s'installe au point que le ministre de l'information du Sierra Leone ait déploré le traitement sélectif de l'information par les médias occidentaux. Ce n'est pas le déploiement massif de soldats des forces atlantistes qui vont rétablir la confiance à moins qu'il s'agisse de cadrer ses populations pour administrer les traitements médicaux jugés nécessaire par l'Otan médical en conjonction avec l'Oms ?

D'ailleurs, l'Union européenne (Ue) ne s'en cache pas puisque les institutions de l'Ue ont prévu de déployer des troupes militaires pour restaurer la sécurité dans les zones épidémiques. Une stratégie du soin ouvertement colonialiste et impérialiste. Il est vrai que l'Union africaine ne compte pour rien dans les stratégies de l'Ue, de l'Otan, de l'Oms et des Usa en Afrique qu'il s'agisse du terrorisme en Afrique ou des problèmes sanitaires. C'est le Nord qui décide pour le Sud dans ses anciennes colonies de ce qu'il y a de mieux pour ces populations en s'appuyant sur des kleptocrates mis au pouvoir par les pays occidentaux. La présidente libérienne, pour ne pas gêner le déploiement des troupes Us, a demandé à ses propres troupes de rentrer dans les casernes tout en réclamant les pleins pouvoirs, tandis que le Qg des forces militaires Us s'est installé au ministère de la défense libérien.

Ebola et coups d'Etat militaire occidental en Afrique de l'Ouest ? Nous reviendrons ultérieurement sur le parcours d'Ellen Johnson Sirleaf qui a toujours soutenu les intérêts étatsuniens au Libéria, même durant la guerre menée par la France et les Etats Unis via le Burkina Faso et l'agent de la Cia, Charles Taylor, contre le dictateur Samuel Doe issu du peuple autochtone libérien qui luttait contre la pénétration Us au Libéria. (Lire également : US admits African war crimes suspect Charles Taylor was CIA agent). Une guerre civile menée dans les coulisses par la France et les Etats-Unis via leur pion Compaoré et Taylor, qui a fait plus de 150 000 morts. A noter que Charles Taylor n'a pas été condamné pour ses crimes au Libéria, soutenu qu'il était par les Usa et indirectement par la France mais pour son soutien à la terrible rébellion du Ruf en Sierra Leone.

La présidente Ellen Johnson Sirleaf adulée par l'administration Obama a joué un rôle de soutien envers le criminel contre l'humanité Charles Taylor à un point tel que la Commission Vérité et Réconciliation libérienne avait demandé à ce qu'elle soit écartée de la vie politique pendant 30 ans. On comprend mieux pourquoi à présent. On comprend aussi mieux pourquoi Ellen Johnson Sirleaf a reçu le prix atlantiste de la paix (aka prix Nobel) avant les élections qui devaient la porter au pouvoir.

Chez les Occidentaux, "la guerre c'est la paix" et "l'intervention militaire c'est le soin". D'Haïti au Libéria même combat ?

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