Version imprimableEnvoyer par courrielversion PDF

Devant le drame qui frappe Haïti, Jacques Depelchin s’élève contre les solidarités et l’humanitarisme de façade qui cachent toutes les exploitations ayant fragilisé ce pays et rendu le désastre plus lourd encore. Selon lui, les ravages causés par les tremblements de terre du 13 janvier «sont peu de choses en comparaison avec ceux créés, infligés, calculés et distillés par les parrains d’un système qui est devenu actuellement tellement prédateur». Haïti est fragile et son malheur est à la mesure de la précarité que vivent les Haïtiens. Pour Depelchin, il est temps de ramener enfin Haïti à la vie, à la mesure de ce que fut son histoire.

Nous exprimons nos plus sincères condoléances à tous ceux qui ont perdu des êtres aimés et particulièrement à ceux qui avant le tremblement de terre souffraient énormément pour avoir poursuivi une lutte commencée deux siècles auparavant. Aux défunts nous souhaitons la paix éternelle et l’accueil chaleureux du Créateur et des ancêtres.

Nous voulons exprimer notre solidarité avec Haïti, un pays, où de 1791 à 1804, les Africains se sont défaits de leurs chaînes au nom de la fidélité à l’humanité. Des Africains, en avance sur leur temps, qui ont donné une leçon à ceux qui habituellement s’attribuent ce rôle, les révolutionnaires autoproclamés d’une révolution préparée par les philosophes des Lumières, nous dit-on. Mais comme l’a amplement démontré Louis Sala-Molins dans le Code des Noirs, pas un seul philosophe ne s’est élevé contre le Code des Noirs, promulgués en 1685 et aboli en 1848.

Les destructions causées par la nature sont peu de choses en comparaison avec celles créées, infligées, calculées et distillées par les parrains d’un système qui est devenu actuellement tellement prédateur que les descendants biologiques et idéologiques (des esclavagistes), comme s’ils étaient sur pilotage automatique, ne peuvent rien faire de mieux que de réagir par des mesures charitables émanant d’une conscience déformée, dominée par une mentalité aiguisée par la quête constante de violation de l’humanité tout en donnant l’impression de l’aimer.

Dans les jours à venir, la souffrance résultant de la destruction causée par la nature enterrera encore plus profondément celle causée par les prédateurs et leurs admirateurs. Mais la fidélité à la vérité que ‘’ tout le monde est monde’’ sera toujours plus forte que l’oubli. Cette espèce de fidélité ne s’apaise pas par les larmes de crocodiles versées par les correspondants des médias qui ressassent des statistiques accumulées par la communauté humanitaire dont s’est la mission de cacher le résultat du crime contre l’humanité en mettant l’accent sur le destin du ‘’ plus pauvre pays de la planète’’. Cette fidélité a résisté, résiste et continuera de résister contre la plus brutale et la plus douce forme de torture, imaginée par ceux, qui au nom de la liberté du capital, ont programmé la lente liquidation de l’humanité.

Ces mêmes correspondants, avec des larmes dans les yeux, soulignent ‘’l’instabilité politique de Haïti’’ tout en refusant de reconnaître son origine, directe ou indirecte, parce que, s’ils creusaient davantage, ils devraient reconnaître qu’en dépit de l’adversité, la fidélité aux valeurs de la liberté, de l’égalité, de la fraternité sont aussi vibrantes que jamais.

Face à cette incommensurable tragédie, Haïti pourra le mieux guérir en étant de nouveau entière. Il doit être permis au président Jean Bertrand Aristide de retourner parmi les siens. Parce que c’est face à de telle tragédie que l’on doit faire appel à la solidarité et s’élever au-dessus des divisions et clivages politiques et idéologiques. Haïti a eu plus que sa part de souffrance. Haïti mérite d’être de nouveau entier et mérite les gestes de solidarité les plus généreux en tant que nation.

Que tous ces membres puissent se retrouver pour reconstruire leur vie. Jusqu’à quel point allons-nous laisser Haïti se vider de son sang ? Il sera difficile dans les jours et semaines qui viennent de ne pas demander à ces organisations qui se drapent dans des habits humanitaires afin d’éviter la fidélité à l’humanité, de nous faire connaître le sort de Pierre Antoine Lovinsky qui a été kidnappé pour avoir demandé avec insistance le retour du président Jean Bertrand Aristide.

* Jacques Depelchin est le co-fondateur de l’Alliance Otabenga pour la paix et la dignité en RD Congo.

* Veuillez envoyer vos commentaires à [email protected] ou commentez en ligne sur www.pambazuka.org