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17 janvier 1961-17 janvier 2012. Cinquante et un ans dans l’esprit de Patrice Emery Lumumba,?à l’école de la conscience?de l’histoire?de la guérison?de l’humanité,?de la justice,?de la vérité? ; 51 ans?apprenant?à renouer avec MÂÂT? il y a 5000 ans.

Pour qui veut écouter les voix de la conscience en RDC, venant de la RDC et d’autres pays, il est clair que ces voix de la conscience émanent d’une majorité de la population, révoltée par un processus électoral frauduleux et criminel. Il serait erroné de voir dans cette révolte des consciences seulement le rôle de la hiérarchie de l’Église Catholique. Révolte n’est pas un mot trop fort pour décrire ce qui se passe en RDC. Les racines de cette révolte sont multiples, profondes, séculaires. Minimiser l’importance de cette révolte des consciences comme cherchent à le faire certains organes de presse démontre le degré d’inconscience des forces qui, de génération en génération se sont enrichies sur le dos des Congolaises et des Congolais.

On peut observer, même à distance, que les consciences révoltées s’organisent pour que, cette fois, le changement en RDC ne tombe pas dans les travers qui ont toujours marqué les transitions historiques en Afrique. Le bras de fer qui est maintenant engagé peut amener à une rupture d’avec les habitudes séculaires qui ont conduit l’humanité aujourd’hui au point où son obsolescence n’est plus le fait de spéculation philosophique, mais un fait qui interpelle toute personne de conscience, angoissée par la situation de l’humanité, obsédée par la recherche de gains matériels, par l’imposition de la loi du plus fort en tout et partout.

Que ce soit en RDC, en Europe, en Asie, dans les pays riches ou les pays pauvres, les consciences révoltées expriment le même message : que cesse la dictature de la corruption, que cesse la dictature de l’injustice, que cesse la dictature du mensonge, que cesse la dictature de la finance. Que cesse la recherche de liquidation des plus pauvres par les plus riches. Que cesse le recours à la charité, à l’humanitarisme pour liquider les consciences révoltées fidèles au maintien de la justice, au maintien de la vérité, au maintien de l’humanité.

Ces consciences révoltées disent qu’elles en ont assez des manipulations des mots qui disent une chose tout en pratiquant systématiquement son contraire. Que règnent justice et vérité, sans partage, sans négociation. Pour ces consciences révoltées, un objectif semble dominer : Une fidélité sans faille à la justice et à la vérité défendue patiemment, mettra fin à toutes les pratiques de corruption. Pourquoi penser que ces consciences révoltées congolaises peuvent être porteuses de quelque chose d’inédit ?

LES PLANS « A » ET « B » AUTOUR DE LA RDCONGO : UN REGARD

Le plan A de la corruption des élections n’ayant pas fonctionné comme ils l’espéraient, les architectes de la dictature cherchent frénétiquement à mettre en place le plan B.

Ce plan B doit, pour le dictateur, ses employeurs et ses employés obligatoirement reproduire ce que le plan A envisageait.

S’enrichir sur le dos des Congolaises et des Congolais ne date pas d’hier ou même d’avant-hier. Pour mieux résister aux futurs plans B, il est bon de se rappeler que l’histoire du Congo est à la fois spécifique et générique. Avant que les trafiquants négriers ne décident de faire de l’Afrique leur terrain de chasse privilégié à la recherche des esclaves, leur sollicitude prédatrice avait réduit la population indigène du Nouveau Monde à une fraction de ce qu’elle était avant leur arrivée en 1492. (voir Ch. Mann, 1491, David Stannard, The American Holocaust).

Les pratiques de corrompre la justice et la vérité ne datent pas d’il y a 51 ans quand les héritiers des enrichis se sont organisés pour liquider Patrice Emery Lumumba parce que celui-ci s’était engagé d’être fidèle à la justice et à la vérité en vue de défendre les intérêts des Congolaises et des Congolais. Il y a toujours eu une seule humanité. En liquidant Lumumba, les enrichis sur le dos des Congolaises et des Congolais liquidaient aussi un membre de l’humanité.

Pour la période qui nous intéresse, le dernier demi siècle, la dictature de l’injustice et du mensonge prenait ses racines dans l’esclavage. Cette dictature de l’injustice et du mensonge est plus puissante que les individus sortant de la fission liquidatrice de l’humanité qui a commencé avec l’industrialisation du trafic négrier à partir de l’Afrique. Les dictateurs partent, mais le système qui leur a donné naissance reste.

Sous l’esclavage, sous la colonisation, sous la néo colonisation, la dictature de l’injustice et du mensonge s’est trouvée face à face aux fidèles à la justice et à la vérité, connues et inconnus : Kimpa Vita, Kimbangu, Lumumba, Mulele, et des milliers d’autres. Ne devrait-on pas réfléchir sur les leçons de notre histoire : Kimpa Vita brûlée vive pour avoir dénoncé l’esclavage, un corps sans sépulture ; Patrice Emery Lumumba, son corps liquéfié dans un bain d’acide sulfurique, un corps sans sépulture. Du 2 juillet 1706 au 17 janvier 1961, liquidation de 2 personnes dénonçant la déshumanisation d’un système qui s’appelait esclavage et puis colonisation. Deux consciences révoltées par la situation qu’elles ont rencontrée sur leur parcours. Deux consciences affirmant leur humanité, mais liquidées pour ne pas s’être pliées aux exigences d’un système soutenu par toutes les instances politiques, économiques, religieuses venant de l’extérieur.

Dans toutes les transitions de notre histoire, sans exception, nous retrouvons une caractéristique principale, à savoir que ceux qui se sont enrichis sur le dos des Congolaises et des Congolais se sont toujours organisés pour que les transitions ne changent pas les rapports entre les enrichis et les appauvris.

L’objectif était toujours de maintenir le mode de fonctionnement du plan A.

En cas de doute, renvoyons au livre de Louis Sala-Molins (Le Code Noir ou le calvaire de Canaan, p. 277) qui rappelle comment au moment de l’abolition de l’esclavage, les planteurs et les abolitionnistes étaient d’accord, comme le résumait si bien Tocqueville : « Si les nègres ont droit à devenir libres, il est incontestable que les colons ont droit à n’être pas ruinés par la liberté des nègres. » au cas où on pourrait penser qu’il s’agirait d’un lapsus, Sala-Molins cite encore le même Tocqueville : « La France, Messieurs, ne veut pas détruire l’esclavage pour avoir la douleur de voir les Blancs ruinés quitter le sol des colonies et les Noirs retomber dans la barbarie. » Et encore : « Peu s’en faut que nous ne les prenions [les nègres] pour un être intermédiaire entre la brute et l’homme. »

Pour les enrichis, tout changement est acceptable dès lors qu’il ne change pas leur statut, leurs privilèges, le rapport de force entre eux et celles/ceux que leur système appauvri/torture/détruit. Ces derniers ne doivent jamais concrétiser leur rêve d’une société plus juste, basée sur la vérité, sur la solidarité. Face à la fidélité à la justice à la vérité, à la solidarité, à l’humanité, les enrichis répondent par la charité, l’humanitarisme, soit le maintien de rapports de soumission des appauvris aux enrichis, selon les règles (écrites ou non) par eux. Les règles peuvent même changer, mais la règle immuable doit être celle qui reproduit la soumission des appauvris aux enrichis.

POURQUOI CE QUI SE PASSE EN RDC EST IMPORTANT POUR LE RESTE DU MONDE ?

Dans la hiérarchisation de l’histoire, la coutume dominante est de reléguer l’histoire des pays comme la RDC à un rang de figurant. Les statistiques des Nations Unies sur les pays les plus corrompus n’expliquent pas les divers chemins par lesquels la corruption s’est étalée. Par où a commencé la corruption de l’humanité comme une et indivisible ? Par où a commencé la corruption de la justice et de la vérité d’une humanité une ?

Quand les plus riches comprendront qu’à l’origine de leur richesse se sont commis des crimes contre l’humanité ; quand les plus riches admettront qu’à l’origine de leur richesse il y a eu une corruption criminelle de la justice et de la vérité, de l’humanité ; quand commencera le dialogue juste et vrai entre riches et pauvres pour sortir de la hiérarchie dictée par les plus riches, ainsi pourra commencer le début de la guérison du crime contre l’humanité chaque fois reproduit quand les plus riches refusent de reconnaître comment leur justice, leur vérité, répandue au nom de la civilisation s’est transformée au cours des siècles en une barbarie qu’on appelle globalisation. Une barbarie qui reproduit, en changeant les mots, les discriminations venant de mentalités acquises durant l’esclavage, la colonisation, l’apartheid. Ces mentalités se sont enracinées car l’impunité des injustices, des mensonges des plus riches, mis à part de rares exceptions, était et reste la règle. Les consciences révoltées des Congolaises et des Congolais sont en train de dire que cette mentalité doit être déracinée.

À suivre ; 17 janvier 2012

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