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Le 16 juin était la date anniversaire du soulèvement de Soweto en Afrique du Sud. La jeunesse noire sud-africaine se trouvant aussi marginalisée aujourd’hui que celle protestant contre les politiques de l’Apartheid, Blackwash souhaite commémorer le soulèvement et promouvoir le développement de la conscience des Noirs. Inspiré par le 16 juin et les mots de Steve Biko, Blackwash encourage les jeunes Noirs en Afrique du Sud à reprendre la lutte et faire pression sur le gouvernement pour amener de vrais changements.

L’article est une dénonciation du pouvoir actuel à Pretoria, pour le mettre sous pression afin qu’il améliore les choses. «S’il ne veut pas nous entendre nous devons lui rendre la vie difficile, à lui et aux Blancs qu’il sert», écrit l’auteur.

Cher jeune Noir,

La jeunesse noire vivant en Afrique du Sud est aux prises avec de graves difficultés. Bien qu’en 1994 notre gouvernement noir nous a promis une vie meilleure, nombreux sont ceux qui vivent encore dans des habitats de fortune ou dans de petites maisons RDP parce que les Blancs continuent de posséder le 80% des terres sud africaines, terres qui ont été volées au cours de ces derniers trois cents ans.

Les jeunes Noirs doivent se demander ce qui retient le gouvernement pour améliorer nos conditions de vie et quel futur sera le notre, si nous n’avons pas de terre. Est-ce que les Noirs ne vont pas rester prisonniers dans leur taudis et leur commune pour toujours, si notre gouvernement continue de refuser de reprendre notre terre aux Blancs ?

Beaucoup d’entre nous n’ont pu obtenir leur diplôme parce que les écoles noires n’ont pas de bonnes ressources comme les écoles privées, comme au temps de l’éducation bantoue pendant l’Apartheid. Qu’avons-nous fait pour mériter cela ? Certains d’entre nous finissent en prison parce que nous sommes obligés de voler et de commettre d’autres crimes afin de survivre. Parce que les jeunes Noirs n’ont pas obtenu leur diplôme ou n’ont pas d’argent pour accéder à l’éducation supérieure, beaucoup en viennent à commettre des crimes et finissent en prison,

La pauvreté des Noirs signifie que beaucoup d’entre nous finissent derrière les barreaux parce que nous sommes contraints à des expédients pour survivre, nous et nos familles. Comment se fait-il que ceux qui ont volé nos terres continuent d’en profiter et ne sont pas considérés comme des criminels ? Pourquoi est-ce qu’un Noir qui a volé un téléphone cellulaire, quelques milliers de rands, un laptop ou une paire de jeans, est puni plus que ceux qui vivent sur des terres volées ?

Certains d’entre nous finissent dans la drogue ou consomment beaucoup d’alcool parce que nous voulons oublier cette dure existence. Souvent nous nous battons et même nous nous entretuons pour des choses mineures parce que nous n’avons pas de but dans nos vies. Ce sont les Blancs qui nous oppriment et contrôlent tous les aspects de nos vies depuis très longtemps, qui sont la raison pour laquelle nos vies sont ce qu’elles sont. C’est la raison pour laquelle nos écoles sont de mauvaise qualité. C’est la raison pour laquelle nous sommes pauvres et pas eux. C’est la raison pour laquelle nous vivons dans des taudis ou dans des maisons RDP dans les communes. C’est regrettable que même un gouvernement noir n’ait pas l’intention d’améliorer nos conditions de vie. Mais nous n’avons pas choisi d’être noirs et pauvres !

Ceux qui sont responsables de nos conditions de vie sont les mêmes que ceux qui nous blâment comme si nous étions personnellement responsables. On nous dit d’aller à l’église, d’étudier avec assiduité, de faire du sport ou de nous joindre à des groupes culturels, mais rien de tout ça ne nous aide parce que notre situation ne change pas. Même si nous essayons, il n’y a pas de terrain ou de centre de récréation au milieu des taudis et rares sont ceux dans les communes. C’est pourquoi beaucoup de jeunes Noirs ne peuvent utiliser ou développer leurs talents. Ils finissent dans des débits de boissons illégaux ou pourrissent en prison avec leurs talents.

Certains d’entre nous vont dans de bonnes écoles, trouvent du travail, des fonds de Umsobomvu, achètent des voitures ou même deviennent célèbres, mais c’est une minorité en comparaison de ceux qui continuent de vivre dans la pauvreté leur vie durant. Aussi, les quelques Noirs qui réussissent quittent les communes pour aller vivre au milieu des Blancs et commencent à se comporter comme eux. : ils nous regardent de haut et nous accusent d’être paresseux (tout comme les Blancs depuis qu’ils sont arrivés dans ce pays). Nous devons nous demander combien de temps encore les Noirs doivent souffrir avant que les choses ne changent pour nous

Gardant tout ceci à l’esprit, est-ce que vraiment vous croyez notre gouvernement lorsqu’il nous dit que nous sommes libres ? Où est cette liberté qu’ils nous promettent quand les Noirs sont si pauvres, quand les jeunes noirs sont sans emploi, en prison ou entrain de mourir du sida ou d’overdose ?

On nous dit que nous sommes libres, mais ceci est un mensonge. On nous dit que les Blancs et les Noirs sont égaux, mais nous savons que dans notre propre pays, la vie des Blancs est meilleure que la nôtre. Nous savons que leur vie est meilleure grâce au dur labeur des Noirs qui construisent leur maison, leurs faubourg, s’occupent de leurs enfants et lavent leurs habits. Les Blancs vivent comme des visiteurs qui viennent chez vous, vous expulsent et s’attendent à ce que vous satisfassiez à tous leurs besoins pendant qu’ils vivent dans le confort de votre maison. Ils vivent comme des dieux sur terre parce qu’il y a des Noirs qui sont comme leurs esclaves et s’occupent de tout. Pourquoi sommes-nous si pauvres dans notre propre pays ?

On nous distrait avec des spectacles télévisés, des concerts dans les stades et maintenant avec la Coupe du Monde 2010 pour que nous oubliions de demander pourquoi nous devons vivre de la façon dont nous vivons. La majeure partie de ces distractions ne révèle pas la vérité concernant la réalité des Noirs ni ne nous encourage à nous lever pour lutter contre nos oppresseurs. Et même lorsque les Noirs se lèvent pour lutter pour revendiquer les choses élémentaires nécessaires à leur survie, le gouvernement envoie la police pour nous harceler et nous tirer dessus. On ne nous dit pas la vérité quant à l’histoire de notre pays qui nous permettrait de voir comment il a été vendu aux Blancs pour qu’ils vivent mieux. On nous dit d’être patients. Mais jusqu’à quand ? Nos parents et nos grands parents attendent toujours.

Nombreux sont nos parents qui meurent comme des esclaves dans les fermes des Blancs ou dans les mines. D’où est-ce que les Blancs tiennent toutes ces terres ? Si vous leur demandez, ils vous diront qu’ils ont travaillé dur pour l’avoir et que les Noirs ne veulent rien faire. Ils ne vous diront rien de nos ancêtres noirs qui sont morts. Beaucoup de nos parents sont forcés de travailler pour pouvoir acheter de la nourriture. La grande partie de la nourriture est coûteuse parce que les compagnies, possédées par les Blancs, veulent être riches. Contraindre les Noirs à mourir de faim quand bien même leur terre produit de la nourriture, est une façon de nous opprimer. Comment se fait-il que nous n’ayons pas assez à manger alors que nos fermes produisent suffisamment de nourriture pour être vendue à l’étranger ou jetée afin de maintenir des prix élevés ? Nous devons récupérer nos fermes et exiger que le gouvernement nous donnent de l’argent et de l’équipement pour que nous puissions gérer ces fermes afin que les Noirs aient assez à manger.

Qu’est-ce que nous devons faire, nous la jeunesse noire pour changer la situation et tout ce qui concerne la vie des Noirs ? Nous devons apprendre de la jeunesse de ‘76’ qui a été influencée par Steve Biko et son mouvement Black Consciousness Movement (BCM). Ce qu’ils ont appris en lisant ses écrits où il expose ses idées sur le pouvoir des Blancs, l’identité des Noirs et la libération des Noirs les ont amenés à décider qu’ils ne pouvaient pas continuer à être contrôlé par des étrangers blancs. Comme nous commémorons le 16 juin, nous devons nous retourner vers la pensée de Biko et user des mêmes méthodes que la jeunesse noire de ‘’ 76’’ et nous lever et réfléchir sur la manière dont nous voulons nous libérer et, comme eux, crier ‘’ Le pouvoir noir’’ à la face des oppresseurs.

Il y a beaucoup de combats à mener avant que les choses ne changent en notre faveur. Comme disait Steve Biko : ‘’ Tu es vivant et fier ou tu es mort et quand on est mort on ne peut plus se soucier’’. Nous devons mettre le gouvernement sous pression afin qu’il améliore les choses. S’il ne veut pas nous entendre nous devons lui rendre la vie difficile, à lui et aux Blancs qu’il sert.

Si en tant que jeune Noir vous trouvez aussi que les conditions dans lesquelles les Noirs vivent doivent changer et que nous devons lutter contre les Blancs et le gouvernement noir qui les protège, alors prenez contact avec nous parce que nous aimerions vous connaître.

Nous devons nous former nous-même parce que les Blancs et les Noirs qui profitent de notre riche pays ne le feront pas. Ils veulent nous garder dans l’ignorance pour que nous continuions à nous blâmer nous-même pour la situation qu’ils ont créée. Nous devons nous former les uns les autres afin de nous débarrasser de la malédiction qui pèsent sur les Noirs et particulièrement sur les jeunes Noirs. Le gouvernement, la télé, les écoles, les églises et les universités ne nous enseignent pas la vérité. Nous sommes seuls !

Avec nos meilleurs salutations et pour l’amour du peuple noir.

* Blackwash (e-mail) est une nouvelle initiative engagée à stimuler la prise de conscience des Noirs dans l’Afrique du Sud d’après 1994

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