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Au moment où l’Europe s’enfonce dans la crise, le potentiel de développement de l’Afrique s’affirme dans la richesse de ses ressources non encore exploitées. Voir certains pays cumuler les taux de croissance à deux chiffres montre que l’Afrique est comme en train de vivre « le début de sa gloire économique ». Jean-Paul Pougala appelle la diaspora à renter pour contribuer à bâtir ce futur.

Comme il semble loin, le temps où pour consoler les Européens de leur misère, les journaux télévisés européens aimaient mettre à la une les photos des enfants Noirs dénutris. Aujourd'hui, des pays comme l'Ethiopie ont atteint en 2010 un taux de croissance à 2 chiffres. Tout le monde l'a compris, sauf peut-être les Africains de la diaspora qui sont pour la plupart dans une posture de catastrophisme qui fait qu'on a souvent envie de leur demander sur quelle planète ils vivent.


Il est temps que nous abandonnions nos petits privilèges en Occident et la position facile de la critique et de la dénonciation pour rentrer former nos jeunes. C'est notre opération Exodus. L'Afrique a besoin de tous ses fils et toutes ses filles pour consolider la forte croissance en cours. 
C'est dans cette logique que je viens d'accepter de rentrer mettre mon savoir au service de la formation et de la conscientisation de nos jeunes.

Pays de destination : Cameroun


Matière à enseigner : Géostratégie


C'est la première fois que je vais enseigner en Afrique. Le but est de contribuer à la dés-infantilisation de nos jeunes pour les amener à comprendre le monde et les différentes stratégies qui le gouvernent, pour qu'ils soient capables de prendre en main leur propre destin d'abord et celui de notre continent ensuite. Ils doivent être des protagonistes, des acteurs et non des sujets en attente de l'hypothétique providence.

Lorsqu'un jeune quitte les bancs de l'enseignement supérieur, il doit pouvoir créer du travail, son propre travail, créer de la richesse et non plus multiplier des demandes d'emplois ou les concours dans l'administration publique. 
La tache est rude, et c'est justement le défi et la mission de chacun de nous : partager nos connaissances avec les nôtres, partager nos expériences avec nos jeunes pour accélérer le processus pour la conquête de la dignité humaine dans notre chère Afrique.


Il ne s'agit pas d'imaginer toute la diaspora de retour comme des enseignants de profession, non ! Le transfert à la jeunesse africaine de connaissances muries sur d'autres continents, à hauteur de quelques heures de notre temps par semaine aurait des conséquences positives incalculables sur le devenir du continent si chacun de nous s'y met. 
Le taux de croissance toujours très soutenu ne va pas toujours de paire avec une disponibilité locale de ressources humaines adéquates. Ce serait dommage que ce vide ne soit pas comblé par nous.

Nous avons le choix entre laisser nos places en Afrique occupées par les "Coopérants" non qualifiés, avec les rafistolages et leur médiocrité évidente que nous connaissons, pendant que nous cumulons nos prestigieux diplômes mis au placard, pour laver les chiotes ou tout simplement passer notre vie à subir l'apartheid dans une Europe mourante. 
Nous assistons déjà à l'exode des pauvres Européens vers l'Afrique.

L'avenir de l'Europe est très sombre. Nul ne sait comment ils viendront à bout de la très grande désertification industrielle en cours. En Espagne par exemple, 20% de la population est sans emploi dont 50% des jeunes de moins de 25 ans sont au chômage. Dans les pays dits "riches" de l'OCDE, on compte aujourd'hui 44 millions de chômeurs. La réaction naturelle est cet assaut de l'Afrique qui vit le début de sa gloire économique.

En 2010, l'ambassade d'Angola à Lisbonne a reçu 30.000 demandes de visas des Portugais voulant fuir leur pays pour aller vivre en Afrique, c'est-à-dire 115 demandes par jour ouvrable. Luanda a ainsi été la première capitale africaine à fixer un numerus clausus (quota, nombre maximum) par an d'Européens qui peuvent se rendre en Afrique. Et quelques mois ont suffit pour remplir ce quota. Les contrevenants payent par des peines de prison. C'est ainsi que dans plusieurs pays africains, la première cause d'emprisonnement des Européens est l'immigration clandestine.

L'Afrique fait déjà rêver les jeunes Européens. Aux Africains de la diaspora de le comprendre et de prendre leur place dans cette nouvelle Afrique qui voit le jour malgré l'assassinat de nos chefs d'Etat qui osent travailler pour que cette prospérité soit possible et profite d'abord aux populations africaines.



* Jean-Paul Pougala est un écrivain d’origine camerounaise, directeur de l’Institut d’Etudes Géostratégiques et professeur de sociologie à l’Université de la Diplomatie de Genève en Suisse.




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