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Le dossier du Darfour est vu comme un tout premier test pour la nouvelle Union Africaine dans le domaine de la paix, selon Assodesire. Avec un bilan de plus de deux cent mille morts, deux millions de réfugiés et une situation de plus en plus aggravante sur le terrain, le conflit au Darfour met l’Union Africaine à rude épreuve. En ce moment où la situation sur terrain devient de plus en plus alarmante, l’auteur estime que l’Union Africaine doit montrer plus de fermeté et doit surtout vite agir.

La récente réunion extraordinaire au niveau présidentiel du Conseil de Paix et de Sécurité de l’Union, tenue à New York le 20 Septembre dernier en marge de l’Assemblée Générale des Nations Unies, n’a pas donné le résultat escompté. Elle s’est bornée à prolonger le mandat de la Force Africaine dans la région (AMIS) jusqu’à la fin de l’Année 2006 sans réussir à convaincre le gouvernement soudanais à accepter une force des Nations Unies comme l’a prônée la résolution 1706 adoptée par le Conseil de Sécurité de l’ONU le 31 Août 2006.

Alors que ses quelques 7000 hommes, présents sur un territoire aussi vaste que la France n’arrivent pas à empêcher les tristement célèbres Janjaweeds de tuer, de piller et de violer, l’Union Africaine a de la peine à appliquer les dispositions de son propre Acte Constitutif qui consacrent le respect des droits et de la dignité de l’homme, la paix et la sécurité sur le continent. La communauté des ONG a été énormément déçue par les conclusions très faibles de la rencontre du Conseil de Paix et de Sécurité. A la veille de cette réunion extraordinaire, les ONG on présenté aux 15 Etats membres du Conseil une série de recommandations qu’on peut résumer en quatre points :

- Prolonger la Mission de l’Union Africaine au Darfour jusqu’à la fin de l’Année avec une augmentation de son effectif et surtout un renforcement de son mandat ;

- Soutenir la résolution 1706 des Nations Unies autorisant le déploiement d’une Force onusienne au Darfour et convaincre le Soudan à consentir à ce déploiement ;

- Dénoncer le plan du gouvernement soudanais visant à déployer plus de 15000 hommes au Darfur pour chasser les rebelles et instaurer la paix par la force mais, appeler tous les parties en conflit au respect du cesser-le- feu ;

- Appeler la communauté internationale à aider les Forces de l’Union Africaine jusqu'à la fin décembre 2006.

La plus grande réalisation de cette rencontre a été le prolongement du mandat de l’AMIS jusqu’au 31 Décembre 2006 ainsi qu’une hypothétique augmentation de son effectif. Rien n’a été dit – du moins pas officiellement - sur son mandat qui demeure très faible mais surtout très flou. L’Union Africaine aurait consenti à l’augmentation de ses troupes au Darfur mais traîne toujours le pas pour le concrétiser alors la situation sur le terrain s’empire chaque jour avec une intensification des combats dans plusieurs endroits obligeant les organisations humanitaires à évacuer leurs personnels laissant derrière elles, femmes et enfants à la merci des criminels sans scrupule. Aujourd’hui, 40% au moins des populations déplacées n’ont pas accès à l’aide humanitaire.

Devant cette situation, chacun doit jouer rapidement sont rôle :

1) Une Union Africaine plus ferme et plus prompte

L’Article 4 (h) de l’Acte Constitutif de l’Union Africaine lui donne le droit de d’intervenir dans un Etat membre sur décision de la Conférence des Chefs d’Etats, dans des circonstances graves, à savoir : les crimes de guerre, le génocide et les crimes contre l’humanité. Elle est habilitée à le faire même sans le consentement de l’Etat en question.

En ce moment où la situation sur terrain devient de plus en plus alarmante, L’Union Africaine doit montrer plus de fermeté et doit surtout vite agir. Les mesures suivantes doivent être prises immédiatement et sans délai :

- Redéfinir clairement le mandat de l’AMIS en le renforçant pour lui permettre protéger les populations civiles et désarmer les milices Janjaweeds. L’AMIS doit donc passer d’une Force d’observation de cessez-le-feu à une véritable force d’imposition de la paix et garante des droits et de la dignité de la personne humaine. Pour cela, tous les Etats membres doivent fournir d’avantage de troupes et de moyens militaires. Les armées à effectifs pléthoriques des Etats africains doivent enfin servir à quelque chose de positif ;

- Exprimer clairement et publier ses besoins pour le déploiement d’une force plus grande et accepter toutes les assistances proposées par l’ONU et d’autres partenaires ;

- Imposer des sanctions ciblées sur tous les responsables politiques soudanais de toutes les parties en conflits qui violent les accords de paix d’Abuja ou qui empêchent sa mise en oeuvre ;

- Prendre clairement position en faveur d’un déploiement d’ici la fin décembre 2006 d’une opération des Nations Unies à laquelle elle doit pleinement participer.

2) Une Communautaire Internationale plus cohérente et plus réactive

La Communauté internationale doit être unies et doit parler d’une seule voix. La Chine et la Russie doivent se joindre aux Etats Unis, au Royaume Uni, la France et à l’Union Européenne pour faire plier toutes les parties y compris le gouvernement soudanais par toute sorte de sanctions y compris le gèle des avoirs à l’extérieur, un embargo sur les armes et même sur l’achat du pétrole et autres ressources soudanaises, l’interdiction voyager etc.

Dans le même temps la communauté internationale doit immédiatement soutenir matériellement et financièrement l’AMIS pour lui permettre de se renforcer et de se déployer sur tout le Darfour. La Cour Pénale Internationale doit davantage se faire entendre sur son enquête sur le situation du Darfour et émettre des mandats d’arrêts si possible contre les présumés coupables quel que soit leur rang.

Les Nations Unies doivent commencer à se préparer pour un déploiement robuste et massif au Darfour d’ici à la fin de l’Année avec le consentement du Soudan. Cependant elles doivent aussi envisager une intervention stratégiquement musclée sans le consentement du Soudan au cas où la situation humanitaire s’aggravait dangereusement.

Le dossier du Darfour est vu comme un tout premier test pour la nouvelle Union Africaine dans le domaine de la paix. Bien évidemment, elle y a un rôle primordial à jouer. Cependant, eu égard à la gravité de la situation, toute la communauté internationale a le devoir d’y contribuer. Toutes les nations du monde ont la responsabilité de protéger les populations du Darfour car les génocides, les crimes de guerres et les crimes contre l’humanité ne sont pas des affaires africaines mais des crimes odieux qui touchent l’ensemble de la race humaine.

* Assodesire est un activiste africain qui travaille sur la crise du Darfur

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