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Ama Biney examine les défis "des images négatives et des stéréotypes concernant l’Afrique dans notre monde globalisé"

Il y a un rôle pour un média panafricaniste vibrant dans la construction du panafricanisme en Afrique, qui doit remettre en question les images négatives et les stéréotypes dans notre monde globalisé. Ceci est nécessaire, compte tenu du fait que les Européens, non contents de coloniser le continent africain en quête de terres, de ressources minérales et agricoles, ont aussi fait pour le monde le portrait des Africains et de leurs descendants. En d’autres termes, les Européens ont fait main basse sur l’information et le savoir concernant les Africains et ont colonisé l’esprit africain.

Pambazuka News joue un rôle crucial dans la diffusion de l’information concernant l’Afrique par des Africains, et ainsi corrige la perception pervertie qu’on a de l’Afrique. Comme l’a récemment formulé Chinua Achebe, " les gens vont en Afrique et confortent ce qu’ils ont déjà dans la tête en omettant de voir ce qu’ils ont sous les yeux. C’est ce que ces gens attendaient. L’Afrique n’est pas vue comme un continent sérieux. C’est un endroit où il se passe des choses étranges, bizarres et illogiques, où les gens manquent de sens commun".

Pambazuka News est donc une tribune indispensable qui permet aux Africains de lancer des débats et de partager des informations critiques sur ce qui se passe dans d’autres pays africains, sur les bonne pratique et fait la promotion de la mise en réseau afin de finalement faciliter la construction de l’union africaine. Que Pambazuka News soit capable de connecter des milliers d’Africains et non Africains engagés en faveur d’un monde basé sur les principes de solidarité, de justice sociale, de liberté et d’égalité via Internet, est une manifestation du degré des forces productives du 21ème siècle commises pour une finalité positive.

Les réalités africaines continuent d’être disséquées dans les pages électroniques de Pambazuka News, à travers des questions touchant à l’environnement, à la sécurité alimentaire, à la culture, à la sexualité, au genre, aux mouvements sociaux, politiques, ainsi qu’aux questions économiques qui affectent l’Afrique. On parle aussi de l’hégémonie d’AFRICOM, de l’impact du colonialisme et de l’impérialisme dans sa manifestation actuelle de globalisation. Afin de remettre en question et de contrôler le processus et les conséquences de la globalisation, des Africains et des individus progressistes du Nord, qui souhaitent un monde plus juste, requièrent un espace dans lequel forger des alternatives, orienter et influencer le débat et partager l’information afin de résister à l’hégémonie du Nord.

Les info électroniques sont aussi essentielles afin que les Africains puissent s’élever contre les politiques qui se font au détriment du peuple par de tyranniques gouvernements africains, des politiques souvent instaurées sous l’impulsion du Fond Monétaire International, de la Banque Mondiale et des gouvernements du Nord dans le but de lier les économies africaines au capitalisme prédateur néolibéral dont les pays africains doivent se distancer.

Pambazuka News fait partie d’un long continuum historique de la diaspora et sur le continent africain de journaux panafricains constitués en des forums pour que les Africains et les peuples d’origine africaine puissent considérer leurs réalités et défier le status quo. Au début du 20ème siècle, la réalité était celle du colonialisme et de l’impérialisme. Le panafricanisme a été inauguré en 1900 par Henry Sylvester Williams qui, en 1897, a aussi organisé la première association panafricaine et la première conférence panafricaine, à Westminster à Londres, en 1900. Peu après, Marcus Garvey a publié le "Negro World" et a constitué l’Universal Negro Improvement Association (UNIA) d’abord en Jamaïque en 1914, puis à New York.

En 1905, W.E.B DuBois a fondé la National Association for the Advancement of Coloured People (NAACP) et a produit le journal "Crisis". Depuis lors, une pléthore d’autres journaux panafricains ont vu le jour. En août 1925, à Londres, suite à la formation du Pan African West African Students Union (WASU), les étudiants ont lancé un journal appelé WASU en mars 1926.

Aux Etats-Unis et au Canada, l’Association of African Students (AAS) publiait le journal connu sous le nom de African Interpreter, paru d’abord en 1943. De nombreux autres journaux - trop nombreux pour être tous mentionnés ici - ont existé tout au long du 20ème siècles et ont constitué une tribune où ceux d’origine africaine pouvaient exprimer leurs préoccupations et leurs problèmes. Dans les années 1980 et 1990, il y avait des magazines comme West Africa Magazine, African Concord, Africa Events et plusieurs autres qui ont malheureusement disparu.

A l’aube de la deuxième décennie du 21ème siècle, Pambazuka News doit rester centré sur la provision d’une tribune pour les mouvements sociaux africains, les organisations de la société civile, les intellectuels progressistes, les poètes, ceux qui mènent campagne, les artistes et les écrivains afin d’écrire "ce qu’ils veulent", selon la tradition de Steve Biko, une tradition qui parle des problèmes, des réussites et des réalités des Africains sur le continent et dans la diaspora.

Et nous ne devons pas escamoter nos erreurs dans la réalisation de la tâche colossale du programme de développement pour le continent africain, mais les analyser objectivement et bien sûr apprendre sérieusement de nos erreurs cependant que nous progressons comme un peuple divers sur un continent plein de potentiel. Utiliser les médias électroniques afin de globaliser la résistance africaine à une hégémonie doit être l’un des nombreux rôles de Pambazuka News. Pendant que les médias occidentaux ne sont guère intéressés par les nouvelles positives concernant l’Afrique, les récits de réussite sont nécessaires. En tant qu’Africains nous devons avoir des diagnostics analytiques corrects, qui non seulement nous permettent de comprendre notre réalité, mais qui doivent aussi nous donner la clé de solutions effectives.

Il y a une dynamique critique entre la théorie et la pratique et les politiques et les actions. De plus, apprendre d’individus et de communautés qui ont réussi à surmonter les défis sociaux, économiques, politiques, les problèmes écologiques et culturels, fournit l’inspiration pour la transformation de nos sociétés et du monde. L’espérance est vitale pour la résistance à l’hégémonie et la lutte pour un monde meilleur et plus humain

* Dr Ama Biney est un panafricaniste et un intellectuel militant qui vit en Grande Bretagne – Texte traduit de l’anglais par Elisabeth Nyffenegger

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