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Le premier tour de la présidentielle malienne devrait avoir lieu le 28 juillet. "Sur toute l'étendue du territoire national", confirme un projet de loi adopté le 27 mai à Bamako, ce qui semble à priori superfétatoire. On n'y comprend Kidal !

Un projet de loi adopté le 27 mai dernier maintient l'élection présidentielle au Mali pour le 28 juillet, en plein mois béni du Ramadan. Ce qui n'est pas une première difficulté, quant à la mobilisation des populations. Si nécessaire, prévoit le texte, un second tour aura lieu deux semaines plus tard. Jusque-là, aucun problème. Mais, le diable étant dans les détails, une disposition, semble-t-il superfétatoire, amène à s'interroger : "sur toute l'étendue du territoire national".

«Pour la France, il est évident qu'il ne peut y avoir deux pays dans un même pays. Les dispositions seront prises pour qu'à Kidal (nord-est), on puisse voter comme partout ailleurs», déclarait le ministre français des Affaires étrangères, Laurent Fabius, le 28 mai dernier à Bamako.

Kidal est en effet un impair dans le dossier malien, grâce à la France principalement, qui avait élevé le Mouvement national de libération de l'Azawad (Mnla) au rang d'interlocuteur, au même titre que le gouvernement intérimaire malien, avec même une certaine prédilection pour les insurgés, seuls à devoir entrer dans Kidal, au détriment de l'armée malienne.

Des négociations ont eu lieu à Ouagadougou, avec des résultats mitigés, pour trouver un accord pour la tenue du scrutin dans la région de Kidal (nord-est), où la rébellion refuse toujours la présence de l'armée et de l'administration maliennes. Autant dire que le Mali est atteint dans sa souveraineté.

Les premiers moments du 11 janvier, salués par la communauté internationale, n’ont en effet pas chassé le pessimisme ambiant quand il s’agit de la guerre des sables, avec un enlisement inévitable : le Mali est toujours occupé, du moins en partie, plus de cinq mois après l'entrée en guerre de la France, le 11 janvier dernier. La zone de Kidal, libérée par la seule armée française, pose en effet le problème de l'intégrité territoriale pour Bamako qui ne comprend pas, en outre, que Paris veuille imposer les terroristes d'hier comme seuls interlocuteurs à même d'aider à la solution du problème du nord malien.

Le prétexte officiel servi, loin d'aider à comprendre mieux l'entrée de la France en solitaire à Kidal, est fallacieux : on voulait éviter un affrontement direct entre l'armée malienne et les islamistes. Soit ; mais, en cherchant à imposer le dialogue, la France qui a libéré le Mali en se réservant la partie réservée aux otages a choisi ses interlocuteurs. Cela a suscité toutes les interrogations du monde, car la coïncidence est troublante : le dissident d'Ansar Dine et le Mlna rejeté par Bamako se sont voulu des supplétifs de l'armée française pour combattre l'allié d'hier, alors que la solution finale était déjà que les otages étaient à vue d'œil.

Bamako n'est pas le seul marri d'une telle ambiguïté. Le cave qui s'est rebellé le 11 janvier au Mali n'a pas trop longtemps profité de l'illusion sahélienne ; la cote de popularité de François Hollande a fléchi un mois après la guerre des sables, selon un sondage Ifop publié à la mi-février. Le Français moyen ne comprend pas la mort de ses soldats là-bas, en Afrique désertique, sans au moins une compensation qui serait la libération des otages. Mais la bataille du Mali n'a fait que déplacer le mal, entre l'Algérie (In Amenas) et le Niger, sans solution du problème des otages, contrairement aux premières prévisions.

Paris voulait être seul à libérer ses otages de la zone nord-est ; aussi avait-il investi Kidal en frustrant Bamako d'une partie de son territoire national et en lui imposant les preneurs d'otages d'hier comme seuls interlocuteurs. Apparemment François Hollande dont l’image intérieure, posée, semblait jurer avec l’agitation extrême de son prédécesseur, avait voulu respirer par le Mali : il fait pédaler tout le monde en pleine choucroute.

CE TEXTE VOUS A ETE PROPOSE PAR PAMBAZUKA NEWS



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** Pathé Mbodje est journaliste, sociologue

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